Lettre du dernier jour

Ma douce, le soleil ici s’embrase
Les saisons s’embrouillent et se mélangent
Et sur nos sourires le ciel fait table rase.
Et tu sais, autour de moi il n’y a que des anges.
La plaine qui s’étend à mes pieds tremblant
N’a pas de fin, c’est l’éternité qui trône ici
Et sûrement l’immortalité dans nos esprits.
Envoie ces images à nos enfants,
Qu’ils sachent où se trouve leur père
Et qu’ils n’aient pas peur. J’ai encore un peu d’air.
Sous les nuages je ne vois que d’honorables rois
Mais même le paradis n’est qu’enfer sans toi.
Tu savais que le ciel et le soleil s’aimaient ?
Je t’assure, que quand la nuit tombe,
Ils se cachent et sur terre, lâchent une bombe
Et font l’amour derrière une petite haie.

Tu vois, ma douce, que la vie n’est pas aussi laide que tu le croyais…

Mais demain, le jour se lèvera. Non, il explosera
Et dans un ciel de sang les anges se perdront
Et toutes ces beautés redeviendront goudron
Parce que tu sais, ma douce, un jour on s’en ira
Loin de toute cette horreur, loin de la nuit qui étouffe le jour
Il n’y a plus un bruit le long de la lande
Et un grand corbeau traverse le no man’s land
Et dans nos esprits poussiéreux on entend les tambours
Qui annoncent la fin d’une existence
Nous allons nous perdre dans les remous de l’errance
Car chaque jour dans ce désert d’humanité
On perd un peu plus de vie et on devient inanités.
Il se peut que la mort soit agréable ma douce,
Je n’ai pas eu l’honneur de la saluer
Elle m’a poignardée dans le dos, au milieu des fumés
Qui, telles de spectres, nous ôte le moindre souffle.

Tu vois, ma douce, que la vie n’est pas aussi longue que tu le croyais…