Texte écrit pour Soon que j'aime fort, remasterisé pour vos yeux affaiblis.
C’est un garçon comme les autres.
Des yeux, des cheveux, un nez en trompette.
Des jeans, un pull trop grand pour son corps chétif.
Mais ce n’est pas un garçon ordinaire.
Ses yeux n’ont plus de couleur, ses cheveux sentent le sel marin et son nez est cassé par la pesanteur du temps.
Ses jambes fines flottent dans un pantalon à rayures, et un pull péruvien lui serre le torse.
Ce n’est pas un garçon ordinaire.
Son rire n’a pas de fin, laissant des étincelles ébrécher les murs pourris.
Ses mains touchent les barreaux de la ville en faisant un bruit de soufflet.
Le temps joue avec son âme, le jetant dans le passé, le propulsant dans le futur, sans lui laisser le temps d’apercevoir le présent.
Mais ce garçon n’a pas peur.
Quand la nuit le recouvre de ses ailes c’est là qu’il se sent le mieux, les pieds accrochés à la Lune et faisant des grimaces au Soleil qui s’endort dans son lit de plumes.
Il ne sombre pas dans la démence de l’esprit quand ses sens s’embarquent pour un tour de manège lors’que les phares des voitures l’évitent au milieu de la route.
Ce garçon La recherche.
Il persiste.
Les lèvres guidées par le souvenir de Son odeur.
Cette fille qui n’était pas non plus ordinaire.
Cette fille qui prenait des croissants au beurre pour cacher ses larmes de crocodile.
Cette même fille qui sautait du pont de l’autoroute, accrochée à la vie par un fil de carambar mâché.
Mais cette fille n’existe plus.
Ou peut-être ne l’avait-il qu’imaginée.
Lui donnant des airs de demoiselle alors qu’il embrassait une poupée de chiffons.
Murmurant des « je t’aime » au creux des oreilles de son chat.
Mais ce garçon continue à sillonner le monde pour retrouver la Belle qu’il a perdue dans la grande fourmilière de l’Ennui.
Il court, l’aperçoit, la devine derrière une cime d’arbres, la sent derrière une coupe de glace.
Mais ce n’est que l’ombre de son imagination.
Cette fille l’a peut-être oublié.
Mais comment aurait-elle pu ?
L’instance de son regard, la force de ses mains, serrent encore trop son cœur pour qu’elle ait pu l’oublier.
Ce ne sont pas des gens ordinaires.
Ils ne sortent pas le soir comme tout le monde, eux se lèvent le matin, vont courir dans les champs et cueillent les fleurs fraîchement réveillées.
C’est à l’aube qu’ils crient du haut de la falaise que le monde leur appartient.
Et ils retournent se coucher, rêver, s’envoler sur des nuages à moteurs, guidés par leurs pulsions.
Un grand sourire de croissant de lune accroché au visage.
Un air de paix sur le bout de leurs cils.
Une once de tendresse vivant en permanence dans leurs petites rides sans fin.
Qui d’elle ou de lui est le plus vivant ?
L’a-t-elle imaginé ou se fait-il des idées ?
Où ne sont-ils pas nos malheurs mélangés à nos passions ?
Un rêve éveillé.
Un songe du bout de nos têtes.
Une complainte d’orphelins.
Une ritournelle de colombes.
Un éclair au chocolat gris.
Une histoire sans fin…