Luka

- Lukaaaaaaaaaaaaaaa !!
Je m’retournai avec un sourire et réceptionnai tant bien qu'mal un guitariste taille 56.
- Salut, Tom.
- Joyeux anniversaire !!
- … Tu m’l’as d’jà dit hier, Tom…
- M’en fiche ! Re-joyeux anniversaire !
Je rigolai doucement. Il avait pris quoi, le Tom, là ? Caféine ou cocaïne ?
- Il stresse pour ce soir, me glissa Bill l’air malicieux.
- Tu m’étonnes…
- Mais c’est même pas vrai !, s’insurgea l’autre, ‘Y a que toi qui stresse les jours de concert !
- Tais-toi, imbécile…
Et c’était parti pour une querelle entre jumeaux allemands. Je m’en désintéressai rapid’ment pour me plonger dans la contemplation d’la salle de concert. Immense. Grandiose. Rien que d’la voir vide, ça filait la chair de poule. Elle faisait quoi, 4000, 5000 places ? Petit concert de promo, hein… C’t’ait dingue à quel point j’arrivai pas à imaginer Bill, mon Bill et les trois autres zouaves comme célébrités. Même si j’allais m’en rendre compte bien assez tôt. Mais ça, je n’le savais pas encore.
- Luka !
J’fermais la bouche, contemplation béate, quand tu nous tiens, et me r’tournai encore. Gustav sauta de la scène et vint me serrer dans ses bras.
- Joyeux anniversaire, dit-il en français.
J’souris. Il était vraiment adorable, ce mec.
- Georg et moi, on est désolés de pas avoir pu te voir hier, continua-t-il en s’écartant de moi.
- Aucun problème. C’est du boulot de préparer un voyage. Au moins, vous, vous glandez pas comme les deux siamois, là.
J’désignais les jumeaux du menton qui se chamaillaient encore et il rit.
- J’te fais vivsiter ?, m’proposa-t-il.
- J’te suis.
On s’dirigeait vers les coulisses quand la voix de Bill résonna derrière nous.
- Bah, Luka ? Tu t’en vas sans moi ?
Je lui fis un clin d’œil et pris la main de Gustav dans la mienne.
- J’ai trouvé mieux, garçon…
Il en resta bouche bée et Tom de poser une main sur son épaule en soupirant :
- T’as pas assuré la nuit dernière, c’est tout…
J’me raidis en r’pensant à cette nuit et m'laissai entraîner par le rire de Gustav qui m’conduisait dans les coulisses. Les fils et les techniciens encombraient les couloirs, il faisait horriblement chaud et tout l’monde s’énervait plus ou moins. J’retrouvais mon sourire. C’était ça, l’ambiance d’un avant-concert. Gustav et moi, on avançait silencieus'ment jusqu’à c’qu’on arrive à l’arrière d’la scène. Là, une sensation de froid reprit le dessus en moi. J’me tournai vers mon batteur préféré.
- Gustav…
- Mmm ?
- Gabriela… Elle vient avec vous ?
- J’crois.
Son p’tit air de gamin avait disparu. Les sourcils froncés et la mâchoire serrée, il semblait s’intéresser aux projos sans vraiment y faire attention.
- Et ça m’plaît pas, finit-il par dire.
- Moi non plus.
Il s’tourna vers moi, surpris.
- T’as pas d'soucis à t’faire pour Bill, elle va rien lui faire. Il la laiss'rait pas d'toutes façons.
- C’est pas pour lui que j’m’inquiète.
Il me regarda longu’ment.
Et oui, Gustav, tu n’es pas le seul à capter certaines choses. Bien qu’j’aurais préféré que ces choses n’existent pas. Mais comme elles étaient là et bien là, j’allais tout faire pour les chasser. Quitte à me transformer en diablesse. J’étais prête à tout.

P'tain ma Vie, j'sais plus quoi dire devant autant d'talent.
J'aime et en meme temps j'ai peur du virage que prend la vie de Luka.
Je t'aimeeeeee

Gustav m’avait abandonnée pour retourner dans les loges. Seule au bord d’la scène, j’hésitai quelques instants avant de gravir les deux marches qui m’en séparaient et de débarquer de plein pied sur l’espace scénique. J’fis quelques pas sur le sol noir, jonché de fils à l’arrière scène et strié de scotch blanc sur le plateau où allaient évoluer les musiciens. J’finis par m’planter au centre de la scène pour lever les yeux vers les dizaines de fauteuils vides. Waw. Quelle impression de grandeur. J’avais l’sentiment d’être toute petite, exposée aux yeux du monde et bizarr’ment, cette sensation n’était pas déplaisante, bien au contraire. La chair de poule me courrait sur les bras en imaginant ces rangées de sièges remplies. Le fait que seul’ment quatre personnes pouvaient faire vibrer autant d’cœurs ma paraissait bien incroyable tout à coup. Serais-je aussi capable que les garçons de m’produire devant autant d’personnes, qui vous jugent et s’attendent à c’que vous leur fassiez vivre un bout d’rêve… ?
Deux bras enserrèrent ma taille et des lèvres coururent dans mon cou. J’souris et fermai les yeux.
Lui, il savait c’que c’était. A presque 18 ans, c’était dev’nu sa routine. Qu’il y ait seul’ment dix personnes ou quinze milles, il chantait. Et il faisait tout pour communiquer son amour d’la musique et son plaisir de la faire partager à tous ceux qui voulaient bien l’écouter.
- Ça t’plaît ?, m’demanda-t-il.
- C’est grand.
- Oui, c’est sûr.
Il soupirai et chuchota :
- Mais pour moi, c’est immense…
Je m’tournai légèr’ment vers lui.
- T’as peur ?
- Ouais…
Il avait un léger sourire qui s’agrandit quand il ajouta :
- Et dans quelques heures, je s’rais terrifié. Peut-être même plus que d’habitude…
- Pourquoi ?
- Parce que j’saurais qu’t’es là. Quelque part au milieu de tous ces visages anonymes.
- J’hurlerais comme une hystérique en brandissant furieus’ment un panneau « Ich liebe dich für immer, Biiiiiiiiiill ! ».
Il rigola, puis proposa :
- Tu l’fais ?
- Tu peux toujours courir.
- T’es pas drôle…
- J’suis surtout pas une groupie.
Ses lèvres chatouillèrent mon oreille et il murmura :
- T’es pourtant la seule que j’croirais si tu m’disais ça…
J’eus un léger sourire et m’serrai plus fort contre lui. On restait silencieux alors qu’les techniciens s’affairaient dans la salle, sans nous prêter grande attention. Ils avaient d’autres préoccupations que celle de savoir pourquoi Bill Kaulitz se bécotait ouvertement avec une fille.
- Dis, Luka…
- Mmm… ?
- Tu m’chantes quelque chose ?
- Ici ? T’es fou, ça aurait un effet minable et en pus, ‘y a plein de professionnels d’la musique, ça s’rait la honte.
- Allez…
- Tu veux qu’on s’foute de moi ?
- Mais non, ils se fout’ront pas d’toi. Allez, s’te plaît. Chante-moi une chanson.
Il pencha la tête pour m’regarder dans les yeux.
- Pour moi…
J’soupirai. Quel gamin, vraiment… j’resserrai se sbras autour de moi et inspirai un bon coup avant d’m’éclaircir la gorge.
- So lately… I’ve been wonderin’… Who will be there to take my place… When I’m gone… You’ll need love… To light the shadows on your face…Cette chanson reprise par les Nickelback était parfait’ment adaptée à mon état d’esprit. Demain soir, Bill et moi, on allait se séparer. Pour la première fois depuis plus de deux mois. Mêm si c’n’était l’affaire que d’quelques jours, j’me d’mandais bien comment j’allais supporter. J’pouvais plus m’passer d’lui. J’avais b’soin d’lui presqu’en toutes circonstances. Comment ça allait être, une fois qu’il ne s’rait plus avec moi ?
- If I could… Then I would… I’ll go wherever you will go…J’aurais tell’ment voulu qu’ce qoit vrai. Qu’on n’soit jamais séparés et que rien ni personne ne s’mette jamais entre nous. Oui, Bill, j’étais prête pour le toujours. Simplement, j’étais trop maladroite pour le dire.
Une batterie chantait douc’ment derrière moi.
- I know now… Just quite how… My life and love might still go on… In your heart… And your mind... I’ll stay with you for all of time…
Si j’te l’avais dit quand tout allait si bien entre nous, à cette époque où on n’pensait qu’à l’autre et où tout c’qui lui arrivait nous affectait autant. A cette époque où nos cœurs ne s’étaient pas encore déchirés de trop s’aimer. Est-ce que si j’te l’avais dit alors, ça s’rait passer différemment… ? En serais-je là aujourd’hui… ? Qui peut savoir… ? Mais il y a une chose que j’peux t’promettre. J’resterais toujours auprès de toi. Qu’importe c’qui nous séparera.
- I’ll go wherever you will go…

Boum. Boum. Boum.
J'aime pas c'que ça présage.
Dis-moi que tout ira bien...

Je n'aime pas mentir...


<3

C'est toujours tell'ment fort, ma Rob' !
Toute cette intensité qui étincelle dans ton coeur... <3
Pardonne moi pour mon retard. J'ai manqué une chose formidable, là.

Comment pourrais-je t'en vouloir... ? <3